La 5.8x42mm
En 1987, la Chine adopte enfin son propre calibre développé localement, le 5.8x42mm. Cart
ouche intermédiaire, elle est souvent comparée aux 5.56x45 OTAN et au 5.45x39 Russe, et pour cause : c’est effectivement l’équivalent chinois. Si vous écoutez les Chinois, leur 5.8 est supérieure aux 2 autres. De ce genre de déclaration chauviniste, on pourrait en rire, mais en vérité, c’est qu’il existe peu d’infos sur la 5.8 pour avoir un avis juste sur la question. Je vais essayer d’apporter une modeste contribution sur le sujet, afin d’éclairer avec ma lanterne de mes modestes capacités sur le sujet. Pourquoi cette cartouche reste si peu connu malgré son adoption par la Chine comme standard ?
Cette cartouche n’est pas commerciale. Comme la 5.56 et la 5.45 vous me direz, et je vous répondrais « oui mais avec une grosse différence ». En effet, trouver des surplus en vente de 5.56 ou 5.45 reste facile, tout dépendra des arrivages du moment chez votre armurier et ce dans beaucoup de pays du monde. La 5.8x42 vous ne la trouverez nulle part. NULLE PART ! Ou alors avec beaucoup, vraiment beaucoup de difficulté et peut-être des amis bien placés. Concernant les notes CIP ou SAAMI (organismes de standardisation des différentes cartouches pour les fabricants d’armes ou munitions), il n’y a rien sur la 5.8x42. Bon j’ai aucun doute sur le fait que les différents services secrets OTAN et Russes aient réussi à obtenir des 5.8x42 ainsi que de la documentation sur le sujet, toujours est-il que pour les civils, beaucoup de zones d’ombres subsistent.
Histoire En 1949, le PCC (Parti Communiste Chinois) prend le pouvoir et va dépendre beaucoup de la technologie russe, adoptant par la suite que des calibres russes (7.62 Tokarev, 7.62x39, 7.62x54r, 12.7x108), les Russes offrant leur technologie aux pays ayant une idéologie compatible avec eux. Mais durant les années 60, les relations sino-russes se dégradent. La Chine se retrouve alors seule pour développer de nouveaux modèles d’armes. Ce moment est essentiel car les Chinois comprennent alors qu’ils peuvent à tout moment se retrouver seuls, lâcher par leurs meilleurs alliés. Vers le milieu des années 80, les relations entre les Chinois et les Russes se renforcent, et on s’attend tous à ce que l’APL (armée Chinoise) adopte la 5.45x39 M74 pour moderniser son armée. Mais non, ils restent sur la 7.62x39 jusqu’en 1987 (date d’adoption du 5.8x42). En fait le 5.8x42 était en développement depuis le début des années 70. Adopter la 5.45 aurait poser 2 problèmes : le 1er est que l’argent investi dans le développement de la 5.8 soit utilisé pour rien. Le 2nd, c’est de se rendre encore dépendant d’un allié qui peut les lâcher encore. Durant les tests, des fusils d’assauts Type 81 (7.62x39) seront convertis en 5.8x42 afin d’expérimenter le calibre et de confirmer son intérêt et trouver les éventuels problèmes qu’il pourrait engendrer en conditions réelles. En 1987, avec la cartouche est adopté un fusil d’assaut, le fusil d’assaut Type 87. Très peu seront conçu, car finalement l’APL attend la fin du développement du fusil d’assaut Type-95 (QBZ-95), bien plus moderne pour passer son armée entière en 5.8x42 (mais ils n’y arriveront que vers le milieu des années 2000). Lors de l’annexion de Hong Kong, en 1997, l’armée chinoise en profite pour divulguer au grand public sa nouvelle arme, le QBZ-95 qui est chambré dans ce calibre. Le but de cette munition est avant tout de rationnaliser l’inventaire de l’APL avec une munition remplaçant la 7.62x39 et la 7.62x54r. Toutes les armes dans ces 2 calibres étant prévues d’être remplacé par d’autres modèles en 5.8x42. Les performances réelles Vu qu’elle est comparé aux 5.56 et 5.45, bah autant la comparer jusqu’au bout. N’ayant malheureusement pas d’expérience sur ces calibres (seulement 1 tir ou 2 en .223), je vais donc m’appuyer sur le témoignage d’un US Marines (lien dans les sources). Il a fait un test avec un QBZ-95 et des munitions appropriés (87 ou 95 ?) et son expérience est assez intéressante. Il a fait plusieurs groupements de 3MOA à 100m (soit environ 7.5cm). Bien évidement il remet en cause sa faible expérience avec un bullpup ainsi qu’avec ce calibre. Il estime qu’un soldat mieux entrainé ferai 2.5MOA à 100m (soit environ 6.3cm). Ces résultats ne sont pas spécialement bons, la 5.56 M855/SS109 étant de 2MOA à 100m (soit environ 5.1cm) depuis un M16A2, mais reste un bon calibre, plus précis que le 7.62x39 et la 5.45x39 7N6 (mais pas la 7N6M actuelle). Pas de note quand au recul, j’imagine qu’il n’y a pas de différence notable avec la 5.56. Le Marines critique également les rapports officiels chinois, volontairement truqués en comparant des tailles de canons différents mettant ainsi en valeur leur munition 5.8 face au 5.56. Toutefois, à travers tous les rapports qu’il a pu examiner, un point met réellement la 5.8x42 en valeur, c’est la pénétration. Toutes les munitions standards chinoise sont AP (Armor Piercing = perforantes), et elles disposent donc de très bons résultats lorsqu’il faut perforer. La cible est assez claire, les grosses armées équipées de gilets pare-balles ou porte-plaques. La DBP-88 ou DBP-10 (pas l’info précise) perfore à tous les coups 10mm d’acier à 300m. Oui, j’ai bien écrit à tous les coups, pas de 1% d’échec lors des tests. La comparaison de perforation faites par les données américaines et chinoises est sans équivoque, la 5,56 M855 perfore une plaque d’acier de 3.5mm à 700m sans problème. La DBP-88 le fait à 1 000m sur 3.5mm d’acier trempé. Mais ces performances impressionnantes sur la perforation font qu’elle ne fait que peu de lésions sur sa cible. En effet, le projectile ne se fragmente pas à l’impact ni ne se mets à tourner sur lui-même. Il se contente de traverser sa cible de part en part. Sur ce point, la 5.56 et la 5.45 font mieux. Et on a un exemple où cette cartouche fut utilisée, à Haïti, là où furent un peu plus d’une centaine de casques bleus chinois (sur environ 12 000 troupes). La 5.8 est mitigé en combat urbain, sa perforation est réelle, rien ne lui résiste : les briques, le métal, les carrosseries de voitures sont traversées et la cible derrière est blessée. Mais comme dit précédemment, la balistique lésionnelle ne suit pas, et la cible doit être touché à de multiple reprises pour être mise hors combat. Ce laps de temps pour mettre hors de combat une cible proche peut être fatal pour l’opérateur de 5.8x42. Un environnement plus large avec des distances d’engagement plus longues est préférable.
La 5.8 aurait dû remplacer la 7.62x39 mais également la 7.62x54r, laissant un inventaire de calibre plus réduit pour l’armée chinoise, passant ainsi à seulement 5.8x21, 5.8x42 et 12.7x108. Mais ils ne l’ont finalement pas fait, la 5.8x42 montrant une balistique faible à longue distance et la 7.62x54r est finalement remplacer par la 7.62x51 (oui, la munition de l’Otan) en 2020. Vu le prix investi dans ces cartouches qui finalement ne sont pas à la hauteur (sans être mauvaise) j’imagine que l’APL a dû faire un choix rationnel. La 7.62x51 est à destination des mitrailleuses polyvalentes, les 5.8 sont légères et les 12.7 un chouia lourdes (même si certaines 12.7 chinoises sont très légère pour leur catégorie). Dernier point, le matériel de production des cartouches semble vieillissant et les doses de poudres non régulières, ce point n’aidant pas à la précision vous vous en doutez. Le Marine souligne ce point comme principale problématique de la 5.8x42. La qualité des étuis encore fait en acier et non en laiton est également jugés discutable. Les différents types de cartouches Comme le 5.56 qui à plusieurs standards, et au passage le 5.45x39, le 5.8x42 en a également plusieurs. Bien qu’elles soient parfois dédiées à un type d’arme, elle reste toutes compatible (excepté la DBS-06), les performance balistiques et point d’impacts étant changés bien évidemment, et dans certains cas, la durée de vie de l’arme peut être réduite. DBP-87 Le fusil d’assaut Type 87 est adopté avec la cartouche DBP-87 (Dan, Bu-Qiang, Pu-tong - Cartridge, Infantry Rifle, Standard). Il s’agit d’une cartouche avec un étui en acier peint en marron pour prévenir la corrosion. L’ogive pèse 64 grains (en acier cuivré chemisé), l’amorce est corrosive et la poudre à tendance à laisser un dépôt. Elle est prévue pour le Type 87 puis le QBZ-95. En théorie, la distance max d’engagement est de 400m. DBP-88 (ou DVP-88) Cartouche dites lourde, conçu pour les engagements à plus longues distances sur les fusils de précision QBU-88 et mitrailleuses QJY-88. Par la suite le fusil-mitrailleur QBB-95 adoptera cette cartouche. L’étui est identique à la DBP-87 mais l’ogive est passée à 77 grains dans sa 1èreversion puis à 74grains. Ce changement est dû à la longueur totale de la cartouche (61mm/77 gr contre 58mm/74gr). Cette différence peut causer des problèmes d’alimentation pour les soldats voulant utiliser la DBP-87 dans leur FM ou FP, l’inverse est également problématique. Il existe 2 versions finales en 74 grains, la DBP-88 et DBP-88A dont la seule différence est le type d’alliage de cuivre dans la chemise de l’ogive. Les productions post 99-2000 sont peinte en verte. Bien que je n’aie pas trouvé d’infos allant dans ce sens, je suis certains que lorsque DBP-87 a eu une poudre ainsi que l’amorce de meilleure qualité contre la corrosion et les dépôts, la DBP-88 y a eu également le droit (vu que cela augmente la durée de vie de l’arme). Les pressions lors du tir sont supérieures aux DBP-87 et 95, raison pour laquelle il n’est pas forcément recommandé de tirer cette munition depuis un fusil d’assaut. Cela reste possible mais cela accéléra l’usure de l’arme. Cette cartouche est théoriquement donnée pour des tirs de suppression de 1 000m et 800 pour des tirs précis. Toutefois, les retex montrent un manque de puissance à ces portées et 600m semblent être plus réalistes. DBP-95 Elle est sortie vers 99 pour améliorer les défauts de la DBP-87. Il y a 2 versions, toutes compatibles avec les armes chambrées en 5.8x42, bien que plutôt destinés aux QBZ-95. La DBP-95 avec un étui en acier peint en vert et une amorce large (date à laque la DBP-88 y a droit) et la DBP-95A avec un étui en acier cuivré et petite amorce. Les 2 version sont équipés du même projectile que la DBP-87 : une ogive de 64 grains en acier cuivré chemisé. La poudre et l’ogive ne sont pas corrosives et un ajout (lequel ?) permet de réduire (voir de supprimer) le flash du tir. Les performances balistiques restent identiques au DBP-87. Tir max 400m DBX-95 et DBX-88 Versions traçantes des précédentes cartouches sorties vers 2001. Le projectile est composé d’un corps creux en plomb recouvert d’une chemise en acier cuivré et rempli du composant traçant. Les cartouches se distinguent par une pointe peinte en verte. Les cartouches de 95 et de 88 n’étant pas fabriqués dans les mêmes usines, j’imagine qu’il faut donc se référer au numéro d’usine frappé sur le culot pour distinguer une 95 d’une 88.
DBK-01 Probablement adopté en 2001, il s’agit d’une munition de tir à blanc avec projectile en plastique blanc. L’usage du bouchon de tir à blanc permet la destruction du projectile en sécurité. DBS-06 La Russie avait l’APS, un fusil « sous-marin », fonctionnant avec des cartouches aux projectiles extrêmement long (comme un harpon dans l’idée). Et bien la Chine a également une arme dans ce style qui s’appelle le QBS-06. Si l’idée est copiée, la munition elle ne l’est pas. Sur base de 5.8x42, le projectile fait « juste » 120mm. Sa portée est de 30m max sous l’eau. Par contre, le tir hors de l’eau est fortement déconseillé, la portée étant ridicule et la durée de vie divisé par 10. DBF-07 Des cartouches non létales avec un projectile en caoutchouc. Très peu d’infos sur le sujet DBP-10 Dans l’optique de rationaliser les munitions de son armée et de supprimer les DBP-95 et 88, l’APL adopte une munition commune pour ses fusils d’assauts (QBZ-95 et QBZ-03), ses mitrailleuses (QJY-88 et QBB-95) ainsi que ses fusils de précision (QBU-88). Bien qu’il subsiste un problème : toutes ces armes n’ont pas le même taux de rotation des rayures ni la même longueur de canon. Ce qui veut dire qu’au lieu d’avoir une munition précise pour chaque arme, une même munition va devoir faire au mieux pour contenter tout le monde. En bref, on sacrifie la précision afin de rationaliser la logistique (ce qui n’est pas non plus illogique, juste un choix à faire). L’ogive passe à 71 grains, faite en alliage de laiton chemisée ce qui améliore sa perforation. Les étuis sont divisés en 2 productions, les étuis en acier peint en vert avec amorce Boxer (DBP-10A) ou les étuis en acier cuivré avec amorce Berdan (DBP-10). Munition adoptée en 2010. DBX-10 Munition traçante sur base de la DBP-10 (même poids de l’ogive), la partie avant de l’ogive est en plomb et l’arrière creux contient le composant traçant, le tout enrobé dans un alliage de laiton. Elle diffère quand même des DBX-95 et 88 avec une pointe en acier trempé afin d’améliorer sa perforation. La pointe est peinte en verte pour les différencier DVC-12 Munition perforante avec pointe en tungstène peinte en noire. L’ogive pèse 84.7 grains et améliore nettement la perforation, surtout à longue portée. DBU-141 Munition développée pour le fusil à verrou QBU-141. Son ogive avec un cœur en plomb pèse 86.2 grains et ses performances porte plus sur la précision que sur la perforation. La précision serait inférieure à 1 MOA à 100m (soit un groupement plus petit que 2.54cm) L’étui est en laiton et l’ogive en plomb est recouverte d’un alliage de laiton. DBP-191 Avec l’arrivée du nouveau fusil d’assaut QBZ-191, une nouvelle cartouche a été adoptée. Trop peu d’informations à ce jour pour connaitre ces caractéristiques. Les usines Il y aurait 2 usines de fabrications de ces munitions : la 61 ainsi que la 71 (qui fait également les 7.62x54r et maintenant la 7.62x51), l’une se concentrant sur les « lourdes » pour FM et FP, l’autre sur les légères pour les FA. En 2010 avec l’adoption de la DBP-10, les 2 feront cette munition commune. Toutefois la raison pour laquelle certaines productions ne sont pas standards (ex : DBP-10 et 10A) est inconnue. Pourquoi faire des étuis en acier cuivré et des étuis en acier peint ? Pourquoi différent type d’amorces ? Une hypothèse que j’émets repose sur la mauvaise qualité de ces cartouches relevés par l’US Marines : les usines fonctionnent sans doute avec peu de moyens et continuent à « rentabiliser » de vieux appareils plutôt que d’investir dans du matériel neuf qui pourrait soutenir une même cadence avec une seule et même munition homogène. Ou peut-être que en cas de difficulté d’approvisionnement sur un composant (amorce large), l’autre production continuera quand même de tourner. Mais ce ne sont que des hypothèses. Conclusion rapide (pour ceux qui aiment pas lire) Le 5.8x42 est un calibre dont la trajectoire est comparable aux 5.56/5.45. Bien qu'il s'avère nettement plus perforant, sa balistique lésionnelle est cependant inférieure. Une mauvaise qualité de fabrication le rend moins précis que ses homologues OTAN et Russe. Liste des principales armes utilisant la 5.8x42 Fusil d’assaut : Type-87, QBZ-95, QBZ-03, QTS-11, QBZ-191 FM et Mitrailleuse :QJY-88, QBB-95, QJS-161 (note : bien que QJY désigne les mitrailleuses universelles, la 5.8 c’est avéré trop faible pour de longue distance d’engagement, QJS désigne les mitrailleuse légères, terme bien plus adapté pour cette cartouche) Fusil de précision et DMR : QBU-88, QBU-141, QBU-191 (sur base de QBZ-191) SOURCES https://www.firearmsnews.com/.../chinas-58x42mm.../384452 Lien principal https://forum.cartridgecollectors.org/.../chinese.../28267 Lien pour des photos de 5.8x42 et autres calibres chinois https://www.gunsandammo.com/.../dbp87-5-8x42mm.../248020 retex d’un US Marines sur la comparaison entre 5.8, 5.56 et 5.45 https://www.thefirearmblog.com/.../modern-intermediate.../ Performance balistique des 5.8 face aux 5.56 M855 (essai fait avec un logiciel, toutes les performances restent théoriques) https://read01.com/0M2DzN3.html#.Y2PBQnbMK70 Lien en chinois avec beaucoup d’informations basique mais beaucoup d’infos sur les photos (marquage de caisse notamment) Et comme toujours, le Wikipédia US qui reste une source d’information correcte mais sans plus. Article rédigé par Mathieu Bro